Le CES de Las Vegas est un événement hors norme :
Lors de l’édition 2015, plus de 200 000 produits ont été présentés par plus de 3 870 exposants répartis sur l’équivalent de 37 terrains de Football parcourus par 170 000 visiteurs. Difficile de tout voir et de tout saisir en 4 petits jours de visite au travers de cette déferlante d’innovations technologiques dans des secteurs aussi variés que la domotique, l’audio, la robotique où la santé. Voici les 5 tendances fortes que j’ai pu retenir de mon parcours sur place en précisant que mes centres d’intérêt se portaient plus particulièrement sur les domaines du Healthcare et de la santé connectée.
1. La banalisation des objets connectés
Ils ont envahis tous les halls et on frise l’indigestion tant ils sont nombreux. Qu’ils soient wearables (porté sur soi) ou objet du quotidien à part entière, pilotés par un smartphone ou autonomes, toutes Les innovations présentées en 2013 et 2014 sont arrivées cette année en phase de maturité.
- D’innombrables trackers d’activités multifonctions de type bracelets (podomètre, rythme cardiaque, sommeil, mesures des constantes…)
- Des montres connectées (Garmin, Runtastic, being, iHealth, iChoice, Scosche, A&D medical…) où le marché devient mature (en attendant toujours l’Apple Watch). C’est le système Android wear qui fait désormais figure de standard en étant adopté par plusieurs grands constructeurs dont Sony (Smartwatch 3)et Samsung (Gear 2 lite).
- Des balances (Withings, Teraillon, Runtastic, iHealth, Quardio, iChoice….).
- Des trackers dédiés au sommeil (Withings Pulse O2, Sense Mother, iHealth AM3.. et apparition des premiers lits connectés (Sleep number X12).
- Des lunettes de réalité augmentée (Sony, Optivent, Odg, Epson, Jins, Toshiba, Oculus..).
- Des vêtements connectés dédiés au sport et santé (Cityzen Sciences D-Shirt S, iChoice wearable ECG Vest).
- Des ampoules connectées pour la domotique ou la bien être (Misfit Bolt) et des simulateurs d’aube connectée (Holî Sleep Companion de FiveFive, Aura de Withings).
Tous ces ensembles de produits sont désormais entrés dans une phase classique de concurrence ou la différentiation se fait sur le mix produit (communication, look, fonctionnalités, prix) et moins sur l’innovation technologique.
Cette banalisation de l’objet connecté se traduit également par une différentiation via des niches où les mêmes technologies et les mêmes capteurs vont être déclinés vers d’autres cibles indirectes comme les enfants ou les animaux de compagnie.
le Quantified self des enfants :
- Celscope OTO : Microscope pour smartphone (Celscope, OTO)qui prend une vidéo de l’oreille de l’enfant et l’envoi directement au médecin.
- Slow control : biberon connecté pédagogique
- Spoutling baby : tracker multifonctions pour bébé (surveillance du sommeil, température, rythme cardiaque..)
- Teddythegardian : ourse en peluche avec paume connectée incluant un tracker pour la température du corps, le rythme cardiaque et le taux d’oxygène dans le sang.
- ibabylabs : camera 360° de surveillance des jeunes enfants à domicile
- Bluemaestro pacifier : tétine connectée capable de tracker la température corporelle du nourisson.
- Fitbark et Wonderwoof : mini pendentif et collier de chiens : tracker d’activités physiques
- Tailio (Pet Wireless) : litière intelligente qui traque le comportement du chat (notamment son poids)
- Petcube : caméra connectée permettant de rester en contact à distance avec son chien ou son chat resté au domicile.
2. L’objet connecté devient invisible et se substitue à la fonction connectée d’un objet du quotidien
- Avec l’ampoule, l’éclairage devient intelligent et se pilote au travers d’une application. Programmable, l’ampoule connectée peut gérer différentes couleurs mais aussi les phases de réveil et d’endormissement (Holî Sleep Companion de FiveFive (FRA) ou la Bolt de Misfit (http://misfit.com).
- Avec le bijou, qui propose des fonctionnalités originales comme un détecteur d’UV (June de Netatmo ; https://www.netatmo.com) ou le suivi de l’activité et du sommeil (Swarovski en partenariat avec Misfit Shine).
- Avec la montre, qui embarque des capteurs de plus en plus discrets. Les montres connectées se démocratisent, s’arrondissent et s’adressent désormais plus au grand public qu’aux geeks déjà suréquipés comme la Withings Pop à seulement 150€ (http://www.withings.com/fr/).
- Avec le lit, beaucoup de fabricants présentent des modèles incluant désormais des capteurs de suivi du sommeil intégré (Sleep number X12 ; www.sleepnumber.com).
Tout cela participe d’une idée très tendance qui veut qu’internet ferait désormais tellement partie de notre quotidien qu’il en deviendrait invisible.
« Il y aura tellement d’adresses IP, tellement d’appareils connectés, de capteurs et d’objets avec lesquels vous interagirez que vous ne vous rendrez même plus compte de la “présence” d’Internet. »
C’est ce que déclarait Eric Schmidt, le CEO de Google lors d’une allocution à Davos ce 24 janvier 2015. Le tsunami d’objets connectés présentés au CES 2015 confirme évidemment cette tendance de fond.
3. L ‘arrivée de spécialistes du B2B Médical sur les marchés des objets connectés et wearables dédiés à la santé
Ces sociétés concurrencent désormais les startups de la première heure positionnées sur le wellness et le healthcare. Ces nouveaux arrivants vont vraisemblablement disposer d’une meilleure connaissance du marché médical en terme de fabrication et de distribution de produits. Elles ont déjà les compétences juridiques internes pour passer plus facilement les étapes délicates des agréments internationaux nécessaires dans le secteur médical.
Ces firmes proposent désormais des appareils médicaux miniaturisés à destination des particuliers et pilotables par smartphone.
- iHealth (USA ; groupe chinois Andon) : blood pressure monitor, glucose meter, smart gluco monitoring system (fda approved), pulse oximeter (http://www.ihealthlabs.fr/).
- iChoice (CHN) : real time thermometer, ECG Vest, ECG, Pen, Blood pressure monitor, fingertip pulse oximeter, oximetry Wristband (http://www.ichoicelife.com/).
- A&D Medical (JAP) : tensiomètre, balance et montre (activité et sommeil) (http://www.andonline.com/).
- Omron Healthcare (JAP) : gamme OMRON Connect : tensiomètre poignet et brassard (http://www.omron-healthcare.fr/).
- Masimo (USA) gamme personalhealth : MightySat (oxygen saturation, pulse rate) (http://www.masimo.fr/).
- Qardio (USA) : Core (wearable EKG/ECG Monitor) ; Arm (wearable blood pressure monitor) (http://www.getqardio.com/).
- Visiomed (FRA) : tensiomètre sans fil, thermomètre sans contact, balance connectée et bracelet d’activité (http://www.visiomed-lab.com/)
Conséquence directe de cette nouvelle donne : les acteurs de la première heure tels que le français Withings positionné sur le secteur de la santé connectée risquent d’être très vite concurrencés par ces spécialistes du device medical. C’est peut être la raison pour laquelle la firme française se diversifie désormais sur d’autres secteurs comme la domotique avec le nouveau Withings Home (système de surveillance vidéo de la maison à distance). On retrouve le même mouvement chez l’autre français Netatmo qui présente également aux CES des objets connectés plus proches de la domotique que de la santé. C’est la cas du système Netatmo Welcome (caméra de surveillance du domicile avec technologie de reconnaissance faciale) ou d’un nouveau Thermostat connecté designé par Starck (https://www.netatmo.com/fr-FR/produit/thermostat) et qui vient concurrencer le célèbre Nest de Google.
4. Au CES 2015, les français sont bien présents
- Giroptic360cam : caméra 360 pouvant se brancher à la place d’une ampoule suspendue (plafonnier) : film et photos en HD (http://www.giroptic.com/).
- Withings Home : caméra de surveillance mobile et HD du domicile permettant le dialogue à distance
- Withings activité : bracelet tracker d’activités (sommeil, podomètre, rythme cardiaque, oxygène dans le sang) (www.withings.com/fr/).
- Citizen Sciences D-Shirt S : vêtement connecté équipé de micro-capteurs (rythme cardiaque, vitesse et accélération, position (gps)indique le niveau de fatigue, le nombre de calories brûlées (http://www.cityzensciences.fr/).
- Lima Technology : technologie permettant d’unifier et de synchroniser via un boitier les contenus de tous types de terminaux (pc, smartphones, tablettes) compatible toute technologie (windows, ios, android, linux, macOS) (https://meetlima.com).
- Voxtok audio Capsule : serveur audio (usb, ethernet, airplay, wifi) capable de numériser de stocker et de diffuser un ensemble très vaste de contenus audios (http://www.voxtok.com/).
5. Mes coups de cœur 2015
Reconnaissance de mouvement et analyse faciale
Le véritable challenge pour ces startups sera de passer la barre des 2 ans et de se faire racheter
Sur le marché récent du Quantified Self , la multiplication des acteurs présents petits ou grands et la concurrence qu’ils vont se livrer semble évidente au CES. Malgré les prévisions optimistes des grands analystes (Idate prévoit un marché de l’ordre de 123 millions de wearables vendus dans le monde en 2018 contre 14 millions en 2014), il n’y aura pas de place pour tous les acteurs présents. Comme pour le web puis le mobile où une multitude d’acteurs se sont lancés sans véritable business model, on peut s’attendre désormais à une phase d’écrémage sévère où une grande partie des produits présentés lors de ce CES 2015 auront disparu dans les 2 ans faute de business model avéré et de clients réels pour acheter les produits proposés.
De ce point de vue, le CES est un endroit paradoxal : un petit surf rapide sur les sites des startups exposants au CES est édifiant : un très grand nombre des produits présentés sont encore des prototypes non disponibles à la vente et en phase de recherche de financement via les sites de crowfunding comme Kickstarter. Comme son nom l’indique le CES est un show : on vient s’y montrer et essayer d’y obtenir une couverture médiatique susceptible d’attirer l’attention des investisseurs.
Au mieux les nouveaux acteurs les plus prometteurs y seront rachetés par les grands groupes tels que Google, Apple ou Samsung qui profitent eux aussi du foisonnement du CES pour découvrir et acquérir à bon compte des technologies et des compétences.
Brice Nadin 25 01 2015
Digital Consult France